Bandeau
A Contretemps, Bulletin bibliographique
Slogan du site
Descriptif du site
Le sort attristant de François Mitterrand
À contretemps, n° 30, avril 2008
Article mis en ligne le 16 janvier 2009
dernière modification le 4 octobre 2014

par .

Le malheur atteint promptement quiconque trahit le sort commun pour se mettre hors la loi, c’est-à-dire pour entrer dans le gang des gouvernants. Le goût du pouvoir est le signe d’une révolte contre l’ordre naturel des choses : chercher à commander, c’est être subversif.

Voyez où en est François Mitterrand : il est en train d’attraper la renommée d’un Gallifet. Ce qui lui arrive avec les affaires d’Algérie est ce que son pire ennemi n’aurait jamais osé souhaiter contre lui. Ministre de l’Intérieur, il est notre adversaire. Mais c’est de l’homme intelligent qu’il fut que nous tiendrons compte ici.

Oui ! Il était loin d’être un sot mais une ambition dévorante l’a dévoré. Le voici engrené et gangrené. La fréquentation d’un certain nombre de têtes vides, genre « politiciens de gauche », l’a achevé. Pour « réussir » il a pris appui sur le vent ; de son esprit à lui, rien ne reste. Il fallait le voir, oiseau déplumé, passant à la télévision à son retour d’Orléansville, empêtré, lui officiellement sémillant, en la plus embarrassée des déclarations.

Puis ce sont les Algériens qui se soulèvent... Les hommes après le sol ! Alors on perquisitionne au 145, quai Valmy, dans le local du Libertaire : c’est plus facile à réaliser que le Massif de l’Aurès.

C’est toujours un grand sujet d’étonnement que de voir un homme d’esprit se mettre de la police. Ce métier est maudit : il faut prier très fort pour quiconque se jette dans cet enfer. Dans le cas de Mitterrand, il est plus que probable qu’il y eut un instant de très grande faiblesse mentale à l’origine du mouvement qui l’introduisit à accepter cette perdition.

Nous sommes prêts à admettre les excuses que font valoir ses amis non policiers. Julien Sorel, 1954, ne veut plus être condamné mais condamner. François Mitterrand avait escompté que, ministre de l’Intérieur, il s’amuserait en ce curieux état. Lui qui n’aime que les femmes et que les femmes aiment, il aurait estimé fort humoristique la besogne de couvrir d’un pudique voile les inélégants gloussements amoureux de Wybot, Dubois, Stéphane et autres flics de haute volée... Enfin un certain besoin de bonapartisme est satisfait en lui...

Hélas ! Même regarder la mâchoire du crocodile est funeste, dit le proverbe arabe. François Mitterrand a mis la tête entière entre des dents avides de lui.

Parmi des milieux soi-disant « progressistes » (?), somnambule ballotté de rêve en rêve par les capitalistes, François Mitterrand est menacé de se réveiller changé en massacreur de prolétaires, en réactionnaire sanglant pour l’éternité.

Armand Robin , Le Libertaire, 18 novembre 1954.


Dans la même rubrique